Paul Agnew © Denis Rouvre
Paul Agnew © Denis Rouvre

Conversation avec Paul Agnew

3 minutes de lecture

Conversation avec Paul Agnew, directeur musical adjoint et chef associé des Arts Florissants au festival dans les Jardins de William Christie à Thiré.

 

Pendant les huit jours du festival, vous avez la chance de jouer en plein air, dans un cadre particulièrement bucolique. Est-ce que cela vous donne de l’inspiration ?

Nous sommes ravis de nous produire ici, cela transforme complètement la vision de la musique et nous donne beaucoup d’inspiration.
C’est le lieu idéal pour mettre en scène des pastorales, comme les oeuvres au programme cette année : Daphnis et Églé de Rameau, Les Fontaines de Versailles de De Lalande et La Grotte de Versailles de Lully.
Ces oeuvres, dont les protagonistes sont des bergers, des bergères, des grands prêtres et des dieux, ont été composées pour les divertissements de la cour à Versailles et à Fontainebleau, où il était courant de faire des concerts en plein air, tout comme en Italie et dans les autres pays chauds. Entre la musique et le cadre nous reconstituons donc quelque chose d’«authentique».

La programmation du festival est très variée, mais son fil conducteur est la pédagogie. Je pense notamment au Jardin des voix, aux étudiants de la Juillard School of Music de New York et aux Arts Flo juniors.

La transmission a toujours été au coeur des activités de William : pendant ses années d’enseignement au Conservatoire National Supérieur de Paris, il s’est rendu compte de l’importance de la musique d’ensemble pour les instrumentistes et les chanteurs.

Pendant leurs études, les musiciens travaillent souvent seuls, mais toute la musique, que l’on soit soliste ou que l’on joue dans un ensemble, se fait avec les autres.
La musique d’ensemble permet de s’habituer et d’apprendre à se référencer aux autres : par exemple si un instrument dans sa phrase suggère une chose, le chanteur doit être capable de l’entendre et de l’utiliser dans son chant.

William a donc commencé à faire jouer certains de ses étudiants avec lui, comme Sandrine Piau, Veronique Gens, Laurent Naouri, qui sont aujourd’hui des grands chanteurs.

Plusieurs artistes issus de nos programmes pédagogiques se produiront au festival : des chanteurs de l’Académie du Jardin des Voix, un programme où des jeunes, venants de plus de 40 pays différentes, se forment pendant trois semaines au théâtre de Caen et intègrent aux Arts Florissants le temps d’une tournée ou de manière permanente; des étudiants du département de musique ancienne de la prestigieuse Juilliard School of Music de New York et les stagiaires du programme Arts Flo Juniors, étudiants en fin de cycle de conservatoire.

C’est une belle opportunité pour faire de la musique de chambre -en intégrant l’ensemble vocal ou l’orchestre des Arts Florissants- et se produire sur la scène du festival.
Les jeunes qui jouent avec nous apprennent des choses qu’on ne peut pas apprendre au conservatoire. Cette expérience de formation est pour beaucoup d’entre eux inoubliable.

 

D’artiste lyrique vous êtes devenu chef d’orchestre. Qu’est-ce qui a changé pour vous ?

Quand j’étais seulement chanteur certaines choses étaient plus faciles et je pouvais me concentrer quasi uniquement sur le chant. Par exemple si j’avais un doute dans l’interprétation je pouvais demander au chef; aujourd’hui je suis la personne à qui on pose les questions et qui doit donner des réponses.

La recherche est donc devenue indispensable pour votre travail ?

La recherche est fondamentale, non seulement pour l’interprétation, mais également pour expliquer les oeuvres au public.
Il est important de s’intéresser à tout ce qui se trouve autour d’une oeuvre et d’un compositeur, comme par exemple l’histoire, la sociologie et les motivations à l’origine des différentes commandes.

Comment votre formation de chanteur vous aide dans la direction d’orchestre ?

Effectivement le chant aide beaucoup dans la direction, il est plus facile de chanter une phrase plutôt que de l’expliquer : c’est simple et immédiat et tout le monde comprend.

Quand on joue ou on chante, il faut avoir la capacité de raconter la musique, car elle raconte toujours quelque chose. Je ressens toute la musique baroque -même instrumentale- comme une musique vocale, car elle est basée sur un phrasé de 4, 8, 12 mesures.
Pour qu’on comprenne l’alternance des tensions et relaxations, la musique doit respirer, comme dans le chant.

Toujours dans un but d’expression, le travail sur le texte est également très important, il faut le dominer et faire en sorte que toute notre imagination s’engage pour transmettre les émotions que le compositeur a voulu exprimer.

Le génie est le compositeur : il faut étudier sa façon d’écrire, son chant, les ornementations qu’il utilise, pour arriver à rendre ce qu’il a entendu avant de mettre le crayon sur le papier.

Parallèlement à sa formation en chant lyrique, Cinzia Rota fréquente l'Académie des Beaux-Arts puis se spécialise en communication du patrimoine culturel à l'École polytechnique de Milan. En 2014 elle fonde Classicagenda, afin de promouvoir la musique classique et l'ouvrir à de nouveaux publics. Elle est membre de la Presse Musicale Internationale.

Derniers articles de Interview