In thy beauty, un spectacle autour des Wesendonck Lieder de Richard Wagner.
“Wo find’ ich dich, du heil’ger Gral, dich sucht voll Sehnsucht mein Herze – Parsifal (1). (Où vais-je te trouver, Saint-Graal, rempli de désir mon cœur te cherche)”
Sur l’Île Saint Louis, sur l’ancien quai d’Alençon, aujourd’hui d’Anjou, se trouve un petit bijou méconnu.
Parmi les magnifiques hôtels des XVIIe et XVIIIe siècles qui regardent la Seine, il y en a un qui, tout au fond de sa cour, cache un endroit inattendu : un petit théâtre en bois, charmant et intime. Des groupes de mélomanes discutent des dernières productions wagnériennes et attendent avec impatience In thy beauty, spectacle autour de l’amour passionné entre Richard Wagner et Mathilde Wesendonck.



Après une mise en bouche tirée du recueil de poésies Tulips and Chimneys d’Edward Estlin Cummings (1923), mis en musique par Marc Hyland (1994), on rentre dans le vif du sujet en parcourant le cycle des magnifiques Wesendonck Lieder savamment associés à la correspondance entre Richard Wagner et Mathilde Wesendonck.
Au fil de ce récit musical et littéraire, nous apprenons les détails de l’exil suisse du compositeur et nous découvrons la profondeur de sa relation avec l’auteur de ces remarquables poèmes, qui l’écoutait « comme Brünnhilde écoutait Wotan ».
En mettant en musique ces lieder pour piano seul et voix de femme, Wagner « trouvait ce qui lui manquait si douloureusement dans son triste foyer : un cœur de femme épris comme lui de beauté et d’idéal, capable de le comprendre, de vibrer à l’unisson de son âme … ».
La soprano Marie Saadi habite la scène avec élégance et douceur et arrive à adapter sa voix large et expressive à la petite salle, sans jamais abuser du forte ou du vibrato. Corine Durous l’accompagne au piano avec complicité et animation. Dommage que Vincent Simonet, qui a remplacé au pied levé l’indisposé Bertrand Renard, n’ait pas fait un récitant aussi saisissant que la musique aurait pu le permettre.



Le voyage dans l’âme wagnérienne se termine par ses pages les plus spirituelles et émouvantes : le Prélude et la Mort d’Isolde. Malgré la fatigue après ce programme intense, Saadi restitue avec un grand engagement le drame et la poésie du dernier souffle d’Isolde.
L’intéressant parcours de In thy beauty permet non seulement de montrer Wagner sous un autre angle, mais, grâce à sa courte durée, permet une première approche du compositeur, avant d’en découvrir les opéras.
« Nulle part peut-être Wagner ne nous apparaît si humainement grand que dans les pages frémissantes où palpite et saigne la blessure secrète qui l’atteignait en plein cœur. »
In thy beauty
Théâtre de l’Ile Saint-Louis – Paul Rey, Paris
Marie Saadi, soprano
Corine Durous, piano
Vincent Simonet, récitant
(1) Richard Wagner à Mathilde Wesendonk : journal et lettres, 1853-1871, trad. Georges Khnopff, O. Mieth, Paris, 1905.