Dichterliebe (Les Amours du poète), Schumann intime par Goerne et Eschenbach.
Matthias Goerne, Baryton
Christoph Eschenbach, Piano
Salle Pleyel, vendredi 24 octobre 2014 à 20h
Robert Schumann
L’Amour et la vie d’une femme op. 42
Les Amours du poète op. 48
Douze chants sur des poèmes de Justinus Kerner op. 35
Au sommet de leur entente musicale, le baryton Matthias Goerne et le pianiste Christoph Eschenbach nous entraînent dans le côté sombre du romantisme allemand avec intensité et poésie.
Dans ce voyage au coeur de l’âme humain et de la passion amoureuse, ils nous racontent « l’amour et la vie d’une femme », de l’aveuglement du premier regard au vide du dernier; puis, avec une grande complicité, ils nous illustrent d’autres amours : ceux du poète, où l’espoir et le rêve laissent la place à la déception et au désespoir et deviennent résignation.
L’intensité sincère de ce cycle vient du profond accablement dans lequel sombra Schumann, quand il se vit refuser la main de sa chère Clara Wieck, par son père.
Ce n’est pas anodin qu’il ait choisi de mettre en musique le tragique « Intermezzo Lyrique » de Heinrich Heine qui reflète si bien les souffrances de sa vie amoureuse. Même si Schumann put enfin épouser Clara, tandis que Heine vit sa cousine Amalia épouser un autre, le résultat est une œuvre véritablement inspirée où l’écriture musicale amplifie les vers du poète et tisse des liens entre les différents lieder.
Si ces recueils ont été écrits pour une voix aigüe, le timbre du Baryton permet une « déclamation » qui s’adapte parfaitement à l’interprétation du troisième Opus, qui se veut encore plus centré sur le sens des mots que sur le chant.
Eschenbach, en créant en amont une atmosphère Schumannienne tantôt rêveuse tantôt douloureuse, accompagne le chagrin et le désespoir chantés par Goerne. L’un comme l’autre incarnent ces récits « noirs » avec intensité dramaturgique et s’affirment comme éminents successeurs de Dietrich Fischer-Diskau et Gerald Moore.