Marielle Nordmann
Marielle Nordmann © HR

Marielle Nordmann : passion, éclectisme et partage

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A l’occasion de la neuvième édition des Musicales de Bagatelle, qui aura lieu du 20 au 22 Mai 2016 à l’Orangerie du Parc de Bagatelle à Paris, nous avons rencontré Marielle Nordmann, directrice artistique de la Fondation Banque Populaire, qui organise le festival.

 

Marielle Nordmann, vous êtes la directrice artistique de la Fondation Banque Populaire, comment a commencé cette collaboration ?

Je collabore avec la Fondation depuis sa création, je me suis occupée de la sélection des lauréats, de la présidence du jury “Musique” et aujourd’hui j’en suis la directrice artistique.

Pendant ces 24 années l’aide de la Fondation aux jeunes artistes a beaucoup évolué, au début on donnait uniquement une aide financière de trois ans et aujourd’hui on s’occupe également d’accompagner les musiciens dans leur entrée dans la vie professionnelle, en leur permettant de se produire en concert. C’est une très belle opportunité qui leur permet non seulement de se faire connaître, mais aussi de jouer dans des contextes et des conditions différentes. Comme disait Lily Laskine, je trouve qu’il faut tout essayer pour devenir un artiste complet, car notre métier consiste avant tout à amener la musique aux gens, leur faire plaisir et les aider à oublier le quotidien.

C’est cet esprit de partage qui vous a donné l’idée de croiser musique et handicap ?

Je me suis toujours intéressée au fait de faire entendre de la musique dans les situations les plus difficiles, comme dans les prisons ou les hôpitaux psychiatriques. Je trouve important que les musiciens se rendent compte de toutes les réalités et qu’ils apprennent à jouer pour tous les types de public.

Comme la Fondation s’occupe également de handicap, nous avons eu l’idée de faire rencontrer ces deux réalités, en faisant jouer les lauréats pour des personnes en situation de handicap mais également avec eux. Ce projet est magnifique car une très belle synergie s’est créée et nous avons assisté à un enrichissement mutuel : la détermination de ces personnes à faire de la musique malgré de grandes difficultés a été une vraie inspiration pour les jeunes artistes.

 

Vous vous occupez également du festival « Les Musicales de Bagatelle ». Comment en concevez-vous le programme chaque année ?

Les Musicales de Bagatelle ont été créées par la Fondation Banque Populaire pour prolonger sa démarche d’investissement dans le talent des jeunes musiciens.
Pour l’élaboration du programme, je commence par une réflexion sur les œuvres en essayant de donner un sens à chaque concert et au festival dans sa globalité, tout en restant ouverte aux propositions des jeunes.
Comme j’aime stimuler l’imagination du public, je donne un titre à chaque programme pour que l’on puisse se mettre déjà dans l’ambiance !

Les concerts durent une heure, car il est toujours préférable que les gens sortent avec une grande faim plutôt qu’une indigestion ! Finalement j’aime bien concevoir un programme comme un repas, où quelque chose de léger ou de pétillant introduit la pièce centrale, suivie par un sorbet pour revenir à un plat plus lourd, et où tout est en résonance : les matières, les couleurs, les textures…

A chaque concert vous associez des jeunes lauréats à un artiste plus expérimenté. Comment fonctionne ce parrainage ?

Nous avons imaginé ce système car non seulement il est gage de qualité pour le public, mais il permet aux jeunes de se produire à côté de collègues plus expérimentés et ainsi de progresser considérablement. Faire de la musique de chambre avec des “grandes pointures” est pour moi la meilleure des master-classes et ça donne une très belle synergie aux concerts.

Mais l’alchimie vient également de la façon dont on associe les nouveaux lauréats entre eux, il est donc très important de les écouter avec subtilité afin de déceler des concordances de personnalité et d’expression et créer ainsi des associations intéressantes, qui parfois continuent après le festival.

 

Vous n’avez pas peur d’oser des formations ou des associations originales : l’année dernière vous avez invité le trio jazz avec claquettes de Fabien Ruiz et Park Stickney avec sa harpe électrique. Quelles sont les surprises pour cette année ?

J’aime bien les défis ! Finalement je mène ma vie d’artiste de la même façon.
Bien évidemment, au début j’osais moins, mais avec le temps j’ai cherché de plus en plus d’idées originales et tout le monde était content… ! Pendant ces neuf années nous avons organisé 50 concerts et il fallait se renouveler !

Cette année il y aura donc un petit cabaret qui va un peu décoiffer et un concert avec le jongleur Vincent de Lavenère, dont j’avais vu un spectacle il y a une dizaine d’années et qui m’avait beaucoup marquée. A l’époque il était encore tout jeune, mais j’avais été positivement impressionnée par sa grâce et son attention à la musique.
Comme il est également chanteur il a imaginé un Chant des Oiseaux d’après Clément Janequin, en version voix et jonglage, et nous avons conçu ensemble le reste du programme toujours autour de cette fascinante association.
L’idée est d’offrir au public une heure de bonheur et de bonne musique en compagnie d’artistes de talent, dans une ambiance de générosité et de plaisir.

On retrouve cet éclectisme dans votre carrière de harpiste. Vous avez su valoriser votre instrument en solo, avec l’orchestre et en l’associant à toute une variété d’instruments, comme la flûte, la flûte de pan, le bandonéon, le violon… Comment se sont créées ces rencontres ?

Vous savez, je crois que la vie nous fait des propositions et il faut juste lui faire confiance et les saisir.
J’ai rencontré certains musiciens dans des concerts, d’autres m’ont contacté directement. Quant à Nemanja Radulovic je le connais depuis qu’il a 12 ans, il en a maintenant 30, une magnifique carrière, et nous avons le plaisir de jouer ensemble…

 

Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?

Cette année je serai la marraine des premières Rencontres Internationales de la Harpe à Moret-sur-Loing qui auront lieu du 10 au 12 juin, puis je jouerai à l’Abbaye de l’Epau, avec la flûtiste Juliette Hurel. Pour le reste, je donne des récitals et joue des concertos avec orchestre et je crée des « spectacles-masterclass », comme le “Conte de Jataka” qui va être donné en juin aux Flâneries de Reims.

J’aime beaucoup le théâtre musical, car il offre une très belle opportunité de développement pour les musiciens et permet de communiquer et de rester vivant. Finalement je me rends compte que tous mes projets, mon engagement avec la Fondation Banque Populaire, les Musicales de Bagatelle et ma carrière personnelle, sont interconnectés et que chaque volet nourrit les autres.

Ce que j’ai appris c’est que l’on ne fait rien tout seul et que la seule façon de s’enrichir et d’enrichir les autres est de partager. La réalisation des Musicales de Bagatelle est un travail d’équipe et je remercie du fond du cœur Martine Tremblay et Sandra Serfati de leur engagement.

Permettez-moi de vous laisser avec cette belle phrase : “Je prends l’engagement de protéger la circulation de la richesse dans ma vie en donnant et recevant les biens les plus précieux de l’existence: l’attention, l’affection, le respect et l’amour. Chaque fois que je rencontrerai quelqu’un, je lui souhaiterai silencieusement bonheurs, joies et rires.”

Parallèlement à sa formation en chant lyrique, Cinzia Rota fréquente l'Académie des Beaux-Arts puis se spécialise en communication du patrimoine culturel à l'École polytechnique de Milan. En 2014 elle fonde Classicagenda, afin de promouvoir la musique classique et l'ouvrir à de nouveaux publics. Elle est membre de la Presse Musicale Internationale.

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