A l’occasion du cinquantième anniversaire de l’orchestre de Paris, une vidéo retraçant la vie de l’orchestre a été réalisée. On retrouve ainsi ses moments les plus marquants à travers des interviews des différents directeurs musicaux et des chefs invités au fil des années; on explore en compagnie des membres de l’orchestre les coulisses : entre concours d’admission et répétitions, tournées à l’étranger et déménagements.
“La France est le seul pays qui a pu créer une sonorité nationale et la sauvegarder”
Charles Munch
C’est avec émotion que deux membres de l’Orchestre de Paris se souviennent de Charles Munch, son premier directeur musical. Nous sommes déjà en 1977. Cela fait 10 ans, depuis ce 14 novembre 1967, que ce grand orchestre symphonique français a donné son premier concert au Théâtre des Champs-Elysées. Au programme : la Symphonie Fantastique de Berlioz, La Mer de Debussy et la première française du Requiem Canticles de Stravinski.
Un défilé de grands chefs et des tournées prestigieuses
Il est impossible de comparer tous les grands chefs d’orchestre qui se sont succédé à la tête de l’Orchestre de Paris : Charles Munch, Herbert von Karajan, sir Georg Solti, Daniel Barenboim, Semyon Bychkov, Christoph von Dohnányi, Christoph Eschenbach, Paavo Järvi et depuis 2016, Daniel Harding.
Chacun d’entre eux a su comprendre le potentiel de l’orchestre, a laissé ses marques et a contribué à écrire son histoire.
Seulement un an après sa fondation, l’orchestre a déjà joué dans ce qui était encore l’Union soviétique, et se prépare pour sa première tournée américaine. Au programme : 20 concerts aux Etats-Unis, au Canada et au Mexique. Suivra une tournée au Japon en 1970.
Un grand potentiel et des rencontres au sommet
Après la mort de Charles Munch, Herbert von Karajan est nommé conseiller musical : “Quand j’ai entendu l’orchestre je voyais commencer à naître quelque chose qui n’avait jamais existé en France, avec un esprit tout à fait nouveau. C’est pour cela que je suis là !” disait-il dans une interview.
Parmi les autres grands chefs invités, on retrouvera, entre autres, Seiji Ozawa, Sergiu Celibidache, Claudio Abbado, Arthur Rubinstein, Claudio Arrau et Léonard Bernstein.
C’est ce dernier, qui en 1971 prend la direction de l’Orchestre de Paris pendant quatre jours pour une performance que personne d’autre n’avait jamais tenté : jouer et diriger en même temps le Concerto en sol de Ravel.
Pendant les 50 ans de la vie de l’orchestre, on retrouve des rencontres exceptionnelles aussi du côté des solistes invités, avec, entre autres, Jessye Norman, Karl Böhm, Maurice André, Itzhak Perlman, Murray Perrahia, Luciano Pavarotti et Mstilav Rostropovitch.
La longue quête d’une salle
C’est en 1972, avec l’arrivée de Sir Georg Solti, que commence à se poser la question d’une résidence fixe pour l’orchestre : à Paris l’orchestre joue à la Salle Pleyel, au Palais des Congrès, au Théâtre des Champs-Elysées, mais il lui manque sa propre maison : “Il est absolument nécessaire de changer la situation et de faire construire une salle de concert”, déclarait le chef hongrois.
Au fil de la vidéo, nous retraçons donc le périple de l’orchestre, soumis au changement constant des lieux de répétition, se retrouvant parfois dans des locaux complètement inadaptés, obligé de déménager plusieurs fois, fluctuant entre espoir et déception.
Pour Daniel Barenboim, qui sera Directeur musical de 1975 à 1989, ce n’est pas “dommage qu’il n’y ait pas de salle pour l’Orchestre de Paris, c’est honteux !” Si la France veut avoir un grand orchestre dont elle peut être fière, elle doit lui donner une salle.
En 1982 commence la construction de l’auditorium de la Cité de la musique, un projet qui aurait dû durer 5 ans.
Malheureusement, il ne sera terminé que 13 ans plus tard.
En attendant, l’orchestre est donc en résidence à la salle Pleyel, refaite en 1981, mais est obligé de déménager en 2002 à cause d’une nouvelle rénovation. Pendant quatre saisons, on le retrouvera à la salle Mogador avec Christoph Eschenbach comme Chef principal.
Malgré les différentes solutions apportées aux besoins de l’orchestre, il faudra donc attendre 43 ans pour qu’il puisse, enfin, avoir une salle digne de son envergure : la Philharmonie de Paris, où il pourra enfin s’installer en 2015, avec son choeur.
Le Choeur de l’Orchestre de Paris
“Ce choeur a une qualité que je n’ai jamais trouvé ailleurs : tout ce qu’ils font en répétition, ils le font 10 fois mieux au concert”. C’est ainsi que son créateur et premier chef, Arthur Oldham, parlait de ce choeur étonnant composé de 300 amateurs, qui est aujourd’hui dirigé par Lionel Sow, qui ne manque pas d’apparaître dans la vidéo.
Créé en 1976, le Choeur de l’Orchestre de Paris fait ses débuts à l’église Saint-Eustache dans le Te Deum de Berlioz dirigé par Daniel Barenboim.
En 1979, il interprète le Requiem de Berlioz dans la cathédrale Notre-Dame de Paris, devant les caméras de TF1, pour la première retransmission télévisée d’un concert, puis de 1994 à 1998 il participe à l’intégrale Beethoven sous la direction de Wolfgang Sawallisch, et enfin on le retrouve en 2010, dans la 8ème symphonie de Gustav Mahler pour un concert exceptionnel à Bercy devant 6000 personnes.
Un orchestre au coeur de la vie politique et culturelle française
D’autres moments manquants de l’orchestre sont aussi montrés dans la vidéo, comme le concert exceptionnel au Panthéon pour l’investiture du Président François Mitterrand le 21 mai 1981, le 20ème anniversaire en 1987, où Georg Solti et Daniel Barenboim dirigent l’orchestre, le concert de 2008 sous la pyramide du Louvre où Pierre Boulez dirige l’Oiseau de feu de Stravinsky devant 2500 personnes.
Afin de donner une idée encore plus pertinente de l’histoire de l’orchestre, on y retrouve aussi ses participations aux productions artistiques les plus iconiques, comme le Wozzeck d’Alban Berg et l’Elektra de Richard Strauss mis en scène par Patrice Chéreau, ou encore le Ring de Wagner au Théâtre du Châtelet dans une production de Robert Wilson.
On suit l’orchestre dans les plus importants festivals internationaux, comme aux Chorégies d’Orange, où en 1971 il était dirigé par Carlo Maria Giulini, au Festival d’Edimbourg en 1973, au Festival de Salzbourg en 1969, ou encore à Aix-en-Provence, quand en 1970 il créait Tout un monde lointain d’Henry Dutilleux avec Mstislav Rostropovitch, car la musique contemporaine a toujours été au coeur des activité de l’orchestre. Comme l’affirmait Daniel Barenboim : “Nous avons peut-être joué plus de musique contemporaine que tout autre orchestre symphonique au monde !”
La fin d’un périple et un nouveau départ
C’est pendant la direction musical de Paavo Järvi que l’Orchestre de Paris trouve enfin sa maison.
En 2015 la Philharmonie de Paris est inaugurée, et depuis, elle est animée par les formations en résidence et par les nombreux artistes invités, entre autres : Martha Argerich, Esa-Pekka Salonen, Janine Jansen, Andris Nelsons, Lang Lang, Jean-Yves Thibaudet, Bertrand Chamayou, James Gaffigan, Maxim Vengerov, Renaud Capuçon, Sabine Devieilhe, Edgar Moreau, etc…
Depuis 2017 l’Orchestre de Paris est en résidence au Festival d’Aix-en-Provence, mais un autre événement a marqué ces dernières années : l’arrivée de son nouveau Directeur musical, le talentueux Daniel Harding, qui a ouvert la saison avec Les Scènes du Faust de Goethe et de Schumann et qui depuis son arrivée fait salle comble.
La nouvelle saison de l’orchestre de Paris se prépare déjà et entre l’année Bernstein, le centenaire de la mort de Debussy et la résidence du compositeur Jörg Widmann, nous ne pouvons qu’être impatients de la suivre.