© Stefano Mazzonis di Pralafera
© Stefano Mazzonis di Pralafera

Conversation avec Stefano Mazzonis di Pralafera

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Conversation avec Stefano Mazzonis di Pralafera, directeur général et artistique de l’Opéra Royal de Wallonie.


D’où viennent vos passions pour le théâtre et l’opéra ?
Depuis toujours. J’ai fait ma première mise en scène quand j’avais 6 ans : j’étais en vacances d’été et avec mes amis on a joué sur un poème qu’on avait appris à l’école : Il sabato del villaggio (Ndlr. un poème de Giacomo Leopardi, à propos de villageois se préparant pour la fête du dimanche).

Mon approche du théâtre a été vraiment spontanée, car une carrière artistique n’était pas envisageable pour mes parents. Enfant, je faisais des spectacles à la maison pour ma famille et mes amis où j’interprétais plusieurs rôles : des hommes, des femmes, des jeunes et des vieux. Comme le théâtre et la musique ont toujours fait partie de ma vie, ces deux passions se sont tout naturellement retrouvées dans l’opéra.


Le programme de cette saison met à l’honneur des œuvres rares comme Les Joyeuses Commères de Windsor de Nicolaï, L’Auberge du Cheval Blanc de Benatzky et Luisa Miller de Verdi. Comment l’avez-vous imaginé ?
La création d’un programme est souvent la combinaison de plusieurs fils rouges qui se croisent : une coproduction, la suggestion d’un chanteur… tout s’enchaîne.
Les Joyeuses Commères de Windsor de Nicolaï, auquel je réfléchissais déjà depuis 10 ans, a pu être monté car j’ai enfin trouvé un coproducteur, de même pour le superbe Luisa Miller de Verdi.

Je suis ravi d’avoir programmé l’Auberge du Cheval Blanc de Benatzky car il s’agit d’un vrai petit chef d’œuvre, très rare mais populaire, qui montre qu’il y avait d’autres compositeurs talentueux en Europe à l’époque de Donizetti…


La programmation de cette saison tourne autour de la femme…
Tout à fait. Dans Cenerentola, Manon, Tosca, Les Commères , Rigoletto, l’Elisir d’amore et l’Auberge la Femme est protagoniste, tantôt victime, tantôt agitatrice, et on y retrouve également un autre thème : celui de la vengeance.


Quelle est la réponse du public à ce type de répertoire ?
Nous avons réussi à fidéliser un public et à donc le rassurer : même si nous programmons un opéra rare, il nous fait confiance. Par ailleurs, l’Auberge est une œuvre très facile d’accès donc facile à promouvoir. Il y a une véritable curiosité, une envie de découverte de la part du public. Et souvent, les opéras des compositeurs méconnus ont plus de succès que les œuvres mineures de grands compositeurs.


Votre maison a la particularité de mettre l’accent sur les jeunes et les enfants. Pourriez-vous nous en dire plus ?
La pédagogie, qui a toujours été mon dada, est une des raisons pour lesquelles on m’a confié la direction de l’Opéra Royal de Wallonie, car je n’avais qu’une envie : remplir les salles de jeunes !
La politique que j’avais déjà menée à Bologne avait obtenu d’importants résultats en termes de public, et mes propositions ont pu convaincre ici.


Le problème du vieillissement des publics de la musique classique est toujours d’actualité, comment éduquez-vous les futurs passionnés ?
Je trouve que, malheureusement, mes collègues oublient l’importance du rôle des maisons d’opéra dans la formation des jeunes. Elle ne doit pas être juste une simple couche de peinture, mais le résultat d’une stratégie et d’un engagement complet.
Si nous ne créons pas le public du futur, dans 10 ou 20 ans les opéras seront obligés de fermer.


Quels sont les résultats de votre politique, au fil des années ?
Quand on a commencé on avait plus de scolaires que de familles, avec un ratio de 70%-30%. Aujourd’hui la tendance est inversée : il y a 40% de scolaires et 60% de familles. C’est flagrant, mais je suis ravi qu’il y ait toujours des scolaires, car même si cela une obligation en quelque sorte pour les enfants, c’est une excellente manière de découvrir le monde du théâtre lyrique. Il y a quelque temps, nous avions adapté l’histoire de Turandot pour les enfants, en leur demandant leur avis à l’issue du spectacle : certains d’entre eux étaient enthousiastes, d’autres non. Mais en discutant avec eux, j’ai pu constater que le spectacle les avait tous marqués ; en expliquant pourquoi ils l’avaient aimé ou non, ils s’appropriaient le langage des mélomanes et  apprenaient à partager leurs émotions.


L’Opéra Royal de Wallonie peut aussi être fier de son public, dont 30% sont des jeunes !
Tout à fait, et nous avons constaté que non seulement ils viennent à l’opéra dans les journées qui leur sont dédiées, mais aussi le samedi soir, car comme le spectacle se termine à 23h, ensuite ils peuvent aller en boîte de nuit ! L’opéra commence ainsi à rentrer dans leurs habitudes et nous en sommes ravis.


Vous essayez de vous approcher des jeunes en utilisant également d’autres modalités de diffusion, comme la retransmission via internet.
Je suis convaincu qu’il faut mettre sur internet tout ce que l’on fait ; la diffusion gratuite est très importante pour le rayonnement de la maison. Presque toutes les captations vont à la télévision belge et deux par an sur France 2.


Quels sont vos projets ?
Je suis une machine à idées, mais je préfère tout de même les réaliser avant d’en parler.
Ma priorité est la recherche d’ouvrages et de compositeurs méconnus, pour faire découvrir tous ces chefs d’œuvre que l’on garde dans un tiroir sans souvent savoir pourquoi.

 

Parallèlement à sa formation en chant lyrique, Cinzia Rota fréquente l'Académie des Beaux-Arts puis se spécialise en communication du patrimoine culturel à l'École polytechnique de Milan. En 2014 elle fonde Classicagenda, afin de promouvoir la musique classique et l'ouvrir à de nouveaux publics. Elle est membre de la Presse Musicale Internationale.

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