Dans les coulisses du Centre de Musique Romantique Française de Venise : entretien sur la recherche d’œuvres oubliées ou inédites avec Alexandre Dratwicki, directeur scientifique du Palazzetto Bru Zane.
Alexandre Dratwicki, parlez-nous du travail de recherche du Palazzetto.
L’activité de recherche scientifique du Palazzetto consiste d’une part à identifier des partitions oubliées ou restées inédites, d’autre part à les proposer aux artistes en les accompagnant dans le travail d’interprétation.
En quoi consiste cet accompagnement ?
Quand on retrouve une partition dans une bibliothèque, cela ne signifie pas toujours qu’il est possible de la jouer immédiatement, car l’oeuvre n’est pas nécessairement complète ou dans la version souhaitée.
La partition du “Saphir” de Félicien David, que nous venons de mettre en scène au Théâtre des Bouffes du Nord, par exemple, existait en nombreux exemplaires dans la version pour piano et chant, alors que celle pour orchestre a été probablement perdue.
Dans ce cas, un travail d’adaptation et de transcription devient nécessaire, ainsi que l’accompagnement des musiciens pendant les répétitions.
Comment faites vous le choix de vos “compositeurs en résidence” ?
Nous faisons un choix d’opéras sur deux niveaux : les inédits d’artistes aux noms très connus et les bijoux d’autres compositeurs tels que Félicien David, George Onslow, Étienne Méhul, Gabriel Pierné, …
Le patrimoine romantique français compte entre 6000 et 7000 opéras à découvrir : à eux seuls Bizet et Gounod ont respectivement composé une quinzaine et une trentaine d’opéras.
Nous tenons à faire découvrir des oeuvres inconnues, qui ne sont aucunement “intellectuelles” dans le sens négatif du terme, mais plutôt flatteuses pour l’esprit.
Ce sont des oeuvres agréables et immédiates, tout en étant “intelligentes” du point de vue musical.
Et s’il n’est pas évident de rapprocher le public de ce répertoire, une fois qu’il y est confronté il est généralement enchanté.
Vous avez parlé de musique “intellectuelle”, pourriez-vous nous en dire plus ?
La musique classique aujourd’hui est en train d’évoluer, de la musique élitiste qu’elle était dans les années 1980 elle est en train de se “normaliser” et de s’ouvrir aux nouveaux publics.
Nous cherchons à créer des vocations, en laissant de côté l’ “intellectualisme” comme fin en soi, pour tendre vers le plaisir de l’écoute.
Quels sont vos projets pour la rentrée ?
2014 est l’anniversaire de la Première Guerre Mondiale et nous souhaitons faire un travail qui parle de toutes les guerres, des guerres napoléoniennes à la celle de 1870 contre l’empire austro-hongrois, qui a donné jour à la Société Nationale de Musique.
Nous nous intéressons aux manières dont la musique a pu être sollicitée par la politique en tant qu’art national.
Le programme s’appellera « Romantisme entre guerre et paix » et sera donné à Paris à la Cité de la Musique, aux Invalides, à l’Auditorium du Louvre et à l’opéra Comique.
Rendez-vous donc à partir de septembre à Paris.