Quatuor Modigliani © DR
Quatuor Modigliani © DR

Entretien avec Loïc Rio, violoniste

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Dans les coulisses des Rencontres Musicales d’Évian : entretien avec Loïc Rio, violoniste au sein du Quatuor Modigliani.

 

Comment se passe la réorganisation d’un festival qui renaît après 13 ans et après Rostropovitch?

Nous sommes ravis d’avoir été choisis pour la direction artistique des Rencontres Musicales et nous en remercions l’Évian Resort, qui est à l’origine de ce projet.
Le quatuor Modigliani a été choisi parce que l’histoire d’Évian a toujours été très liée au quatuor. En effet, c’est à Evian que se tenait le concours international du quatuor à cordes. Nous avons également été choisis parce qu’il y a une vraie volonté de miser sur les nouvelles générations de musiciens et sur l’avenir… Mais l’héritage du passé est toujours présent, ainsi qu’une grande admiration pour Rostropovitch, qui a apporté une renommée au festival et qui est à l’origine de la construction de la Grange au Lac.
Pour garder ce lien avec l’histoire, nous avons appelé beaucoup de violoncellistes, à commencer par le Quatuor Borodine, qui avait déjà joué sur la scène de la Grange au Lac, jusqu’à la nouvelle génération de violoncellistes comme Edgar Moreau, Pablo Ferrández, Daniel Müller-Schott et Marie-Elisabeth Hecker, dernière lauréate du concours Rostropovitch de son vivant.

 

Comment avez vous sélectionné les artistes invités ?

Pendant nos voyages, nous avons rencontré beaucoup de musiciens de talent et nous avons décidé de les faire venir ici pour jouer les répertoires dans lesquels ils excellent. Nous avons invité des musiciens provenant de différents pays et nous avons privilégié des artistes qui, malgré leurs succès dans leurs pays d’origine, sont très peu connus en France, comme Daniel Müller-Schott et Sabine Meyer.

 

Qu’est-ce qui vous a guidés dans vos choix de répertoire pour le festival ?

Notre quatuor a joué dans plusieurs salles et pays différents et cela nous a donné beaucoup d’inspiration pour notre festival.
Nous avons décidé de ne pas choisir une thématique trop stricte pour les programmes des concerts : nous savons bien que pour les musiciens ce n’est pas très agréable de jouer la même chose tous les soirs !
Cependant il fallait trouver un fil conducteur, et nous nous sommes donc permis de demander aux musiciens de jouer au moins une œuvre de Schubert, tout en leur laissant le choix pour le reste du répertoire. Le quatuor Borodine, par exemple, a joué également du Tchaïkovski et du Borodine, et Grigory Sokolov n’a joué que du Chopin, avec des bis de Schubert.

 

Pourquoi avez-vous choisi Schubert ?

Le choix de Schubert nous a paru évident pour plusieurs raisons : parce que c’est est “le” compositeur de musique de chambre par excellence ; parce qu’ayant la trentaine, nous sentons proches de ce musicien qui n’a vécu que 31 ans… Et enfin parce qu’il a créé les Schubertiades, ces moments d’échange et de rencontres musicales et littéraires autour de ses œuvres.
Mais nos rencontres ne se veulent absolument pas élitistes : notre politique tarifaire a donc été diversifiée et accessible, la Grange au Lac nous offrant des places à tarif modéré sans aucune dégradation acoustique ni visuelle ; tous les étudiants de l’Académie, avec laquelle nous avons collaboré dans le cadre du festival, ont eu l’accès gratuit aux concerts.

 

Dans ces Schubertiades, vous avez mis en avant des combinaisons d’instruments plutôt rares (comme deux pianos, deux violoncelles et un cor) et vous avez fait jouer ensemble des musiciens des générations différentes comme Gérard Caussé, Renaud Capuçon et Edgar Moreau… Qu’est-ce qui a motivé vos choix ?

Il est important pour nous de mélanger les générations et les instruments et de pouvoir programmer des œuvres que le public n’a pas l’opportunité d’écouter souvent, comme l’Octuor à cordes de Mendelssohn et l’Andante & variations de Schumann.
Tout cela a également pour but de favoriser la rencontre et l’échange entre les artistes : il y en a ici qui se connaissent déjà et sont contents de se revoir, et d’autres qui se rencontrent et jouent ensemble pour la première fois.

 

La rencontre et le partage sont à la base du modèle de festival que vous souhaitez proposer. Quel est l’intérêt de ce modèle ?

L’idée est que ce festival soit également un lieu où les artistes puissent se poser un moment, entre un voyage et un autre, pour profiter du lieu et des rencontres humaines et musicales.
Nous souhaitons d’abord que les artistes soient contents et épanouis ici, qu’il prennent le temps de répéter et d’expérimenter, et que jouer ensemble ne soit pas juste un patchwork, mais un vrai partage et un moment d’enrichissement réciproque.

 

Quel est le bilan de cette édition et quelles sont les idées pour l’année prochaine ?

Nous sommes très heureux de cette première édition et nous avons, bien évidemment, plein d’idées pour l’année prochaine !
Le public a déjà été très présent pour une première édition et nous sommes très contents d’avoir tissé des liens avec les structures de la région.
Pour nous il était très important que l’Orchestre de Pays de Savoie et l’Académie Musicale d’Évian jouent un rôle dans cette aventure, déjà parce que leur énergie culturelle était là depuis plusieurs années, mais également parce qu’il est important que les artistes et surtout les jeunes musiciens puissent profiter de cette atmosphère, des concerts et des classes de maîtres.
L’année prochaine vous retrouverez la même formule de deux concerts par jour, des master-classes et des conférences, mais il y aura encore plus de mélange entre les artistes et plus de combinaisons sur scène…
Rendez-vous en 2015 pour la deuxième édition !

Parallèlement à sa formation en chant lyrique, Cinzia Rota fréquente l'Académie des Beaux-Arts puis se spécialise en communication du patrimoine culturel à l'École polytechnique de Milan. En 2014 elle fonde Classicagenda, afin de promouvoir la musique classique et l'ouvrir à de nouveaux publics. Elle est membre de la Presse Musicale Internationale.

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