Festival Musique et Vin au Clos Vougeot
Festival Musique et Vin au Clos Vougeot © Jean-Louis Bernuy

Les deux passions de Bernard Hervet

4 minutes de lecture

Bernard Hervet, professionnel du vin, a créé en 2008 avec Aubert de Villaine, du domaine de la Romanée-Conti de Vosne-Romanée, et David Chan, premier violon solo du Metropolitan Opera de New York, le festival Musique et Vin au Clos Vougeot, qui marie la musique classique au patrimoine viticole de la Bourgogne. Nous l’avons rencontré dans le cadre de l’édition 2016 du festival, qui vient de s’achever.

 

Bernard Hervet, vous avez deux passions : la musique et le vin…

J’ai découvert le vin quand j’avais 16 ans. Je faisais une saison dans un hôtel pour gagner un peu d’argent de poche et j’ai eu l’occasion de déguster de très grands vins. Comme par hasard, le premier vin que j’ai bu, c’était un Vosne-Romanée.

Ma passion pour la musique a commencé au lycée, grâce à un ami très mélomane qui m’a fait découvrir les œuvres de Chopin. Cela a été une révélation car je venais d’un milieu où l’on n’écoutait pas de musique classique et l’on ne buvait pas de grands vins.  Tout cela ça m’a beaucoup inspiré et m’a donné envie d’en savoir plus.

 

Quelle est la genèse de Musique et Vin au Clos Vougeot ?

Le festival est très récent. Il date il y a une dizaine d’années, quand j’ai rencontré David Chan à New York.

Ce fut la rencontre parfaite : un musicien professionnel passionné de vin et un professionnel du vin passionné de musique.
David Chan désirait mettre en place un festival en Bourgogne et a trouvé en moi le partenaire idéal, car non seulement j’étais mélomane depuis très longtemps mais j’avais déjà organisé des concerts, pendant mes 18 ans à la direction de la maison Bouchard Père et fils.

Quand j’ai quitté Bouchard Père et Fils et que je suis devenu conseiller de François Faiveley, un autre passionné de musique, je lui ai proposé de créer un festival au Clos de Vougeot afin de marier notre patrimoine viticole à la culture. Et comme ce qu’il y a de plus festif est la musique, nous avons décidé de créer un festival !

Nous avons donc fait du soutien des jeunes musiciens la priorité, tout comme la rencontre (et l’amitié) entre les Américains et les Bourguignons, dans le cadre du magnifique Clos de Vougeot.

Et ça a marché !  Dès la première année.

 

Vous êtes à l’initiative de la Fondation pour les jeunes artistes et du fond instrumental. Pourriez-vous nous en parler ?

La Fondation fonctionne sur deux axes parallèles : le premier, consiste à donner chaque année une bourse à deux jeunes talents, l’un du côté des États Unis, en collaboration avec le “Young Artists Program” du Metropolitan Opera, l’autre du côté de la France. L’idée est de mettre en valeur à chaque fois une discipline différente, vocale et instrumentale et de récompenser des femmes et des hommes.
Cette année Daniel Weissmann a selectionné Vladimir Perčevic, jeune altiste serbe qui vit à Paris et, côté américain, David Chan a choisi Hyesang Park, jeune soprano sud-coréenne.

Le deuxième axe du fonctionnement de la Fondation consiste en la fabrication d’instruments, des copies d’instruments anciens, prêtés pour une durée de trois ans à des jeunes talents qui n’ont pas beaucoup de moyens. Chaque instrument porte le nom d’un grand cru et celui du mécène.
Nous avons déjà prêté une quinzaine d’instruments et tous les ans on en fait fabriquer deux ou trois. Vous avez pu les entendre dans le concert de jeudi, où trois jeunes artistes les ont joués en compagnie de Michel Dalberto.

 

Au festival les jeunes musiciens ont également l’opportunité de se produire sur la scène du festival, en compagnie de leurs collègues plus expérimentés…

Tout à fait. C’est une double chance pour ces jeunes, issus des conservatoires supérieurs de Paris et de Lyon, qui peuvent donc jouer ces instruments aux côtés des plus grands artistes de la scène internationale.

 

Quels sont les lieux des concerts ?

Le lieu principal est le Clos de Vougeot où ont lieu trois concerts : deux concerts de musique de chambre et un concert symphonique dans la cour. Ensuite, il y a le Château de Meursault, où cette année le concert n’a pas eu lieu dans le cellier mais à l’extérieur, et le Couvent des Cordeliers, où l’on a fait deux concerts privés pour les jeunes, un avec la classe de violoncelle de Gautier Capuçon et l’autre avec Michel Dalberto.

Ensuite il y a les magnifiques Halles de Beaune.  On a choisi ce lieu afin de décloisonner la musique classique, on souhaite que les gens ne soient pas intimidés par la musique classique et on leur propose donc un concert gratuit où ils peuvent entrer et sortir comme ils veulent. C’est comme une porte ouverte, pour les initier à la musique classique à leur manière.
Cette initiative marche très bien, le public est nombreux et varié, il y a des familles, des jeunes et des moins jeunes…

Au festival on retrouve les solistes du MET et les jeunes talents, mais également des grands noms comme les frères Capuçon et Michel Dalberto. Comment choisissez-vous les artistes ?

Les artistes sont au coeur de notre festival : avec David Chan et Daniel Weismann nous choisissons tout d’abord qui inviter et ensuite nous réfléchissons au programme. Nous invitons des amis et des artistes que nous apprécions et nous avons déjà une liste d’attente absolument incroyable d’artistes qui veulent venir jouer.

 

Qu’est ce que le festival a apporté aux vignerons de Bourgogne ?

Le festival a permis de valoriser le patrimoine viticole de la région et a également contribué à faire inscrire les “Climats de Bourgogne” au patrimoine de l’UNESCO. Mais il a surtout apporté quelque chose de très profond aux personnes qui y ont participé. Je suis très content de constater que les vignerons d’ici sont presque tous des mélomanes !

 

Avez-vous déjà des idées pour la prochaine édition ?

Ça fait déjà beaucoup de projets dans l’état actuel, mais effectivement nous avons l’intention de créer le même genre de festival à New York, toujours dans l’esprit de marier le vin et la musique.  L’idée est de mettre en place un festival en automne où faire jouer les artistes français et internationaux qui ont participé à l’orchestre éphémère des Climats de Bourgogne pendant le festival d’été en France.

Cela nécessite une logistique et une coordination de production de grande envergure, d’autant plus qu’il y a des formalités administratives très complexes liés aux passeports et aux assurances des instruments, mais nous sommes enthousiasmés par ce projet, car il serait une belle concrétisation de cet échange franco-américain.

 

Passionnée de musique depuis son plus jeune âge et pianiste accompagnatrice, Marine partage ses émotions au travers de ses chroniques. Elle collabore en tant que rédactrice avec différents médias français et coréens spécialisés dans la musique classique. Diplômée du cursus professionnel « Administrateur / Producteur Projets Musicaux » à l’Université Paris X, Marine est conseillère artistique et développe divers projets artistiques.

Derniers articles de Interview