L'orgue de l'église Saint-Étienne-du-Mont de Paris © Arnaud Frich

L’orgue de Thierry Escaich et Vincent Warnier

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Deux grands organistes d’aujourd’hui, Vincent Warnier et Thierry Escaich, étaient un concert en l’église Saint-Étienne-du-Mont de Paris ce vendredi 25 novembre. Tous deux, bien qu’ayant été au Conservatoire de Paris, ont choisi des voies d’interprétation très différentes. Et ce concert des vingt ans de titulariat des organistes en a été un bon exemple.

 

Le grand orgue de l’église Saint-Étienne-du-Mont de Paris se distingue par la richesse de modes d’expression qu’il propose. En effet, le buffet, construit en 1630 par Jean Buron, est un chef d’oeuvre de menuiserie. Avec ses quatre claviers, son pédalier et ses 89 jeux, l’édifice a été entre les mains de nombreux organistes dont Maurice Duruflé (1902-1986).

Et c’est par une oeuvre de ce compositeur que s’ouvrait ce concert : la Suite op. 5, en trois mouvements (Prélude, Sicilienne, Toccata), dédiée à Paul Dukas, qui fut l’un de ses maîtres. La composition, qui date en 1934, témoigne de la maturité d’un organiste dont le talent et la personnalité étaient déjà très recherchés.

Bien qu’étant de jeunesse, cette oeuvre, présente déjà des caractéristiques fortes de son langage musical comme une forme de poésie, d’élégance, de profondeur et de sérénité. Vincent Warnier, avec son immense connaissance du répertoire de Duruflé (citons son intégrale de la musique pour orgue parue en 2007), emmène le public dans l’univers du compositeur. Ce qui est justement rappelé par les commentaires du Père Jacques Ollier, curé de la paroisse : “Voyez, je vous montre ce que vous n’aviez jamais vu et qui pourtant est toujours devant vos yeux”.

Ce concert servait à montrer différentes facettes des organistes puisque la composition et l’enseignement figuraient également au programme. Afin d’illustrer ce propos, c’est l’organiste Thierry Escaich qui a proposé Enluminures (écrite en 2015 mais dont c’était la première exécution en concert) pour soprano, violoncelle et orgue. Sa musique se veut ni modale ni sérielle. En effet, Thierry Escaich est en permanence à la recherche d’une musique qui pourrait se définir par des couleurs harmoniques et instrumentales chatoyantes ainsi que par des élans rythmiques implacables. Il emmène donc le public vers des mondes sonores insolites.

Thierry Escaich © Guy Vivien
Thierry Escaich © Guy Vivien

Pour l’accompagner dans sa pièce, l’organiste était en compagnie de deux jeunes musiciens: Yanis Boudris (violoncelle) et Natasha Sallès (soprano). Entre les deux compositions des organistes Maurice Duruflé et Thierry Escaich, le public a pu entendre la célèbre Sonate pour violon et violoncelle de Maurice Ravel. Boudris a retrouvé son confrère Arthur Decaris au violon. Cette interprétation, bien que réussie, était peut être encore trop scolaire. Toutefois, le public, venu nombreux pour l’occasion, a fort apprécié ces deux jeunes musiciens qui vont faire parler d’eux dans les années à venir.

Avant de dire au revoir à l’assemblée, Thierry Escaich avait choisi de faire partager sa passion pour l’improvisation. Habituellement, il propose aussi bien ses improvisations en concert que pendant les offices, ce qui conduit le public vers des horizons sonores nouveaux, des régions inconnues et insoupçonnées. Dans le cadre de ce concert, Thierry Escaich a improvisé à partir des principaux thèmes des oeuvres précédemment entendues.

En conclusion, ce concert anniversaire donné par deux grands organistes a été l’occasion d’entendre l’ensemble des possibilités d’expression de l’instrument. Ce qui peut être souligné par la citation suivante de Duruflé : “Il faut se réjouir de l’intérêt grandissant que le public porte aujourd’hui à l’orgue. L’orgue a pris sa véritable dimension. L’organiste n’est plus considéré comme un être étrange, toujours enfermé dans sa tribune. Il est descendu dans l’arène. Le grand public découvre l’orgue, le roi des instruments”.

Ingénieur en mécanique, mais aussi titulaire d'un master international de musique et musicologie (université Paris-Sorbonne et Université de Sarrebrück) ainsi que d'une licence de sciences, je suis passionné par les instruments et la musique classique depuis mon enfance. Ma jeune carrière m'a permis d'avoir une opportunité à Safran Transmission Systems de 2017 à 2020. En tant que violoncelliste amateur, j'ai participé à l'Annecy Classic Orchestra avec Fayçal Karoui et Denis Matsuev en 2014 et 2015 et au Festival Berlioz en 2016.

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