Depuis 33 ans la Fondation Royaumont propose dans le cadre du programme Voix Nouvelles une session de composition de haut niveau encadrée par des compositeurs de renommée internationale.
A partir de cette année, la session de composition devient l’Académie Voix Nouvelles, et intègre pour la première fois également de jeunes interprètes, suivis par deux ensembles prestigieux : l’américain Talea, dirigé par James Baker et l’anglais Exaudi, dirigé par James Weeks.
Le programme Voix nouvelles, dirigé aujourd’hui par Jean-Philippe Wurtz, a été imaginé pour permettre à de jeunes compositeurs ou interprètes de moins de 31 ans de se perfectionner dans le répertoire contemporain.
Les candidatures pour la résidence sont nombreuses et proviennent de partout dans le monde car “le but de la résidence est également de créer un échange de haut niveau entre artistes de différentes origines avec des perspectives différentes”, nous explique J.-P. Wurtz. Parmi les résidents 2016 on retrouve en effet des compositeurs venant du Royaume-Uni, d’Italie, des États-Unis, du Japon, de Chine et même de Turquie : “preuve de l’émergence du Moyen-Orient”, continue J.-P. Wurtz.
Au-delà des compétences objectives des candidats, la sélection privilégie les personnalités qui peuvent le mieux s’intégrer au groupe, afin que les rencontres soient le plus fructueuses possible.
Un travail individuel et de groupe
Pendant la résidence, les compositeurs ont pour objectif l’écriture d’une pièce, sous la supervision de professeurs de renommée internationale et d’esthétiques diverses, cette année Frédéric Durieux, Raphael Cendo et Pierluigi Billone.
Afin d’être jouées au Festival de Royaumont, leurs œuvres sont ensuite travaillées avec les interprètes en résidence, et une sélection d’entre elles avec les ensembles invités.
Les étudiants sont encadrés de manière individuelle à raison de deux cours avec chaque enseignant, afin de travailler leurs œuvres en profondeur et de bénéficier de conseils spécifiques et pertinents.
“Les professeurs nous donnent des suggestions formelles, nous conseillent sur le traitement de certains éléments” nous explique Adrien Trybucki, un des résidents. “Pendant la première partie de la résidence on suit aussi des cours magistraux, où les professeurs présentent leur travail et leur vision de la composition et nous font écouter beaucoup de musique. C’est très enrichissant !” rajoute-t-il.
En plus du travail individuel et des cours collectifs, chaque étudiant doit également présenter ses recherches à l’ensemble des autres participants, pour que chacun puisse s’ouvrir à d’autres univers et à d’autres esthétiques : “cela apporte un éclairage différent, on entend des choses qui peuvent en évoquer d’autres et ça crée de l’émulation”, nous confie encore le jeune compositeur.
La résidence amène les jeunes musiciens à passer beaucoup de temps ensemble et à partager les moments des repas, en favorisant ainsi l’échange, le partage et la découverte d’autres parcours et approches de la musique.
De leur côté, les jeunes interprètes bénéficient également de cours individuels et des conseils des ensembles invités, pendant qu’ils travaillent des œuvres emblématiques du répertoire de la musique contemporaine et une sélection d’œuvres créées pendant la résidence, qui seront présentées au public dans le cadre d’une “Fenêtre sur cour[s]”.
Les synergies entre compositeurs et interprètes
Après dix jours de résidence, les compositeurs rencontrent donc les interprètes et les ensembles invités afin de travailler ensemble leurs pièces. Cette nouvelle phase est très importante pour les étudiants qui peuvent ainsi confronter leur travail à la réalité du déchiffrage et de la répétition.
Tout comme les professeurs, les ensembles invités font leurs propositions et grâce à cet échange les compositeurs peuvent peaufiner leurs créations. “On apprécie énormément l’expérience de l’Académie car ça nous permet de connaître le compositeur et pas seulement de le voir à la remise de la partition”, nous raconte James Weeks, “nous construisons une vraie relation et nous comprenons ainsi ce qu’il veut dire et pourquoi”.
Ensuite les répétitions peuvent commencer, en vue du concert final qui aura lieu dans le cadre du Festival de Royaumont.
Les interprètes sont très motivés : “Je connais plusieurs musiciens qui ont fait l’Académie de Royaumont où beaucoup de musique complexe et intéressante a été créée”, dit James Weeks ; tout comme les organisateurs : “Je tenais à ce que Talea et Exaudi viennent ici”, nous dit J.-P. Wurtz “pour participer à l’Académie avec les jeunes compositeurs, mais aussi pour présenter leurs programmes, qui sont extraordinaires”.
Le week-end Voix Nouvelles
Pendant le Festival de Royaumont, un week-end est entièrement dédié à Voix Nouvelles. Cette année l’ensemble Exaudi a proposé un programme tissant le lien entre madrigaux du XVIe siècle et musique contemporaine, tandis que l’ensemble Talea, de son côté, a fait deux créations françaises.
La première, Δίκη Wall, est une commandé de l’ensemble pour Pierlugi Billone, actuellement en résidence à l’Académie en tant que professeur ; la deuxième Sideshow de Steven Takasugi, que J.-P. Wurtz avait vu à New-York et tenait à présenter en France.
“Nous avons choisi d’associer ces œuvres très différentes — Δίκη Wall est purement musicale et Sideshow a une forte composante théâtrale — car elles partagent le même type de dynamique de groupe” nous dit le chef de l’ensemble Talea, “l’œuvre de Billone est pour moi une œuvre méta-musicale où le son s’irradie du percussionniste et où les six instrumentistes deviennent un, tout comme dans Sideshow“.
S’inscrire dans une continuité
Au-delà du travail pédagogique et de mise en relation des jeunes artistes avec leurs collègues plus expérimentés, l’Académie se prolonge souvent en accompagnement professionnel dans le long terme.

Des synergies entre créateurs, professionnels et interprètes se créent, et cela favorise des commandes et des collaborations artistiques durables. “Il n’y a jamais de résidence qui ne débouche sur rien”, nous dit J.-P. Wurtz. “Il y a un suivi après l’Académie : des projets sont attribués à certains étudiants, qui vont travailler avec des interprètes, écrire pour la prochaine édition du programme Voix Nouvelles ou recevoir des commissions, parfois même par les ensembles qu’ils ont rencontré ici !”
Un cadre ressourçant et privilégié
La résidence donne également la possibilité de rencontrer d’autres professionnels de la musique, qui sont invités pour des conférences dans le cadre du Festival.
Les conditions qu’offre l’Académie sont uniques : “J’ai postulé à Royaumont, car c’est une académie prestigieuse” nous explique le jeune compositeur en résidence Maël Bailly “mais elle offre aussi un cadre privilégié pour se concentrer et bien travailler, loin des soucis de la vie quotidienne. Le luxe pour un jeune étudiant !”.
“Tout est très bien organisé et les lieux de vie et de répétition sont idéals. C’est un des meilleurs endroits où l’on ait joué !” dit James Baker.
“C’est magnifiquement idéaliste de passer du temps à Royaumont, il y a les ressources pour faire bien les choses. Ici on n’arrondit pas les angles mais on travaille en profondeur”, conclut James Weeks “Je suis ravi d’être ici !”
Compositeurs en résidence en 2016
Maël Bailly
Utku Asuroglu
Edo Frenkel
Edwin Hillier
Yu Kuwabara
Amadeus Regucera
Huihui Cheng
Emanuele Palumbo
Jason Thorpe Buchanan
Dahae Boo
Eiko Tsukamoto
Gerardo Gozzi
Silvia Pepe
Adrien Trybucki
Interprètes en résidence en 2016
Benoit Morel – alto
Krista Low – violoncelle
Yuka Togashi – clarinette
Nestor Bayona – direction
Antonin Rey – direction
Yuri Matsuzaki – flûte
Camille Merckx – chant
Kanae Mizobuchi – chant
Chie Otsuka – piano
Winnie Wang – violon
Ensembles invités en 2016
Ensemble Talea
Ensemble Exaudi