Benjamin Alard © Bernard Martinez

Benjamin Alard au pays des clavecins

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À l’époque baroque, Anvers était la capitale des clavecins. Y travaillait la dynastie de facteurs Ruckers-Couchet, dont les instruments étaient recherchés dans toute l’Europe. Jeudi 27 octobre le claveciniste français Benjamin Alard a joué un récital dans cette ville mythique et Classicagenda était là pour fournir ce compte rendu à ses lecteurs.

Le programme, intitulé « Amsterdam, Londres, Paris, Leipzig : 1711-1741 », se concentrait sur une génération de compositeurs qui ont créé collectivement une approche de composition paneuropéenne. Plutôt qu’un langage musical international cette approche consistait en un ensemble de techniques d’écriture pour le clavier, associé à une prédilection pour des styles musicaux étrangers. Haendel, né en Allemagne et travaillant à Londres, a utilisé un style français pour l’ouverture de sa Suite en sol, HWV 432, tandis que Bach a adopté un style italien pour arranger le Concerto pour violon RV310 de Vivaldi et créer son propre Concerto BWV 978. Même Rameau a traversé les frontières dans son exotique L’Egyptienne.

Alard a joué sur un clavecin d’un timbre chaud et vocal, une copie par Bruce Kennedy d’un instrument du début du XVIIIème siècle fabriqué par le Berlinois Michael Mietke. Son jeu était soigné et contrôlé et démontrait sa grande sensibilité à l’effet des silences dans la musique, comme dans les espaces qu’il laissait entre les accords imitant les cordes de l’orchestre au début du largo du concerto de Bach.

Benjamin Alard © Bernard Martinez

Alard a présenté seulement des œuvres en sol majeur ou en sol mineur pour souligner les similitudes entre des compositions comme les mouvements presto des sonates de Domenico Scarlatti et les 14e et 23e variations des Variations « Goldberg » BWV 988 de Bach. Cet objectif fut réalisé, mais au prix d’une certaine monotonie. De plus, entendre les deux variations « Goldberg » extraites de leur structure de thème et variations était quelque peu déconcertant.

Récital sans pause

Alard a choisi de jouer les morceaux sans pause, donnant l’impression d’une seule et longue œuvre, un effet souligné par la tradition de l‘Augustinus Muziekcentrum (AMUZ) qui est de s’abstenir de tout applaudissement jusqu’à la fin du concert, ce qui nous semblait peu naturel. C’est donc pour saluer l’art d’Alard qu’il y eut de nombreux moments où l’on pouvait sentir le public désireux d’éclater en applaudissements interdits, comme à la fin de la passacaille de Haendel, dans laquelle Alard a fait vibrer ses auditeurs avec des gammes descendantes en cascade et des accords roulés majestueusement.

Jacqueline Letzter et Robert Adelson, historienne de la littérature et musicologue, sont les auteurs de nombreux livres, dont Ecrire l'opéra au féminin (Symétrie, 2017), Autographes musicaux du XIXe siècle: L’album niçois du Comte de Cessole (Acadèmia Nissarda, 2020) et Erard: a Passion for the Piano (Oxford University Press, 2021). Ils contribuent à des chroniques de concerts dans le midi de la France.

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