Sophie Daneman © Sandra Lousada
Sophie Daneman © Sandra Lousada

Conversation avec Sophie Daneman

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Conversation avec Sophie Daneman, artiste lyrique et metteur en scène de “Rameau, maître à danser”


Pour le festival Dans les jardins de William Christie, vous avez mis en scène deux actes de ballet de Rameau. Pourriez-vous nous en dire plus sur ces oeuvres, qui sont peu connues ?

Daphnis et Églé et La Naissance d’Osiris sont deux petites perles, très peu jouées.
Il s’agit d’une pastorale et d’un opéra-ballet composés pour des représentations privées à la cour de Fontainebleau.
L’intrigue de ces oeuvres est très simple : la première raconte l’histoire de deux amoureux qui se croient liés par l’Amitié. Grâce à Amour ils arrivent à comprendre leurs vrais sentiments et échangent leurs serments dans le temple de l’Amour. La deuxième est une histoire de bergers qui se termine la naissance d’Osiris – le Duc de Berry, futur Louis XVI- célébrée par une fête.

Dans ces opéras-ballet il existe un équilibre entre la musique, le chant et la danse : les chanteurs et les danseurs y sont mêlées et tout est fluide, il y a même des chanteurs qui se mettent à danser et des danseurs qui chantent quelques choeurs.

Étant chanteuse et fille d’une danseuse, cette ambiance mélangée, où l’opéra et le ballet co-habitent, est pour moi le vrai théâtre.

 

Comment avez-vous imaginé les différents personnages ?

Dans ces deux pastorales, plusieurs personnages prennent vie sur scène : Amour, l’Orage, deux Grands Prêtres et deux couples d’amoureux.
J’ai cherché à les différencier, comme par exemple le Grand Prêtre, qui est joué dans la première histoire et chanté dans la deuxième.

J’ai également essayé de créer des ambiances : dans la première partie le berger fait un spectacle derrière un tréteau, qui s’ouvre comme dans une fête foraine.


Vous avez choisi de lier ces deux oeuvres par le thème de l’amour.

Oui, j’ai choisi d’établir un lien entre les deux œuvres parce que je voulais qu’il y ait un chemin, un fil conducteur pour la continuité de l’action.

 

Qu’est-ce qui vous a inspirée pour la mise en scène ?

Je me suis beaucoup inspirée des tableaux de Fragonard qui, à travers des thèmes pastorales et des scènes de vie bucoliques, nous fait rêver.

Nous avons cherché à refléter cette musique, à la fois raffinée et sensuelle mais aussi simple et naturelle, également dans les costumes : les formes sont décousues, les corsets disjonctés et les tissus, en cuir, paille et toile de jute, rappellent le paysage.

 

Vous êtes une grande passionnée de Rameau.

Tout à fait. J’ai une relation très proche avec ce compositeur, j’ai chanté Aricie dans Hippolyte et Aricie et ça m’a changé la vie. Il est important pour moi d’essayer de transmettre mon amour pour cette musique qui me touche énormément.

 

Quels ont été les défis de mettre en scène ce spectacle au festival ?

La création de ces deux oeuvres a eu lieu au Manège de l’Académie de la Guérinière à Caen, le Théâtre de Caen étant fermé pour travaux. Nous sommes donc habitués aux lieux atypiques.

Nous produire dans le cadre du festival est une expérience inoubliable, mais ça n’a pas été sans difficultés, car, par rapport à Caen, nous avions moins de temps, moins de chanteurs, un danseur en moins et un danseur qui n’avait pas encore dansé ce spectacle.

 

Comme Paul Agnew, vous êtes également chanteuse. Comment cette compétence influence vos choix de mise en scène ?

En tant qu’artiste lyrique je connais les difficultés et les fragilités de chanter sur scène.
Les choix du metteur en scène sont essentiels pour que les chanteurs se sentent à l’aise et puissent s’exprimer au mieux : il est important de leur donner la raison d’être là, de donner un sens à leurs déplacements et leurs gestes.

Mon expérience me permet d’avoir conscience de ce qu’on peut demander ou pas aux chanteurs. Il y a par exemple des positions qui rendent le chant difficile, où la respiration ne peux pas se faire correctement et des moments où il faut qu’ils puissent avoir le chef d’orchestre dans leur champ de vision.

 

Entre le chant et la mise en scène, vous trouvez le temps pour faire des ateliers pédagogiques. Comment se déroulent-ils ?

Le contact avec le public est très important pour moi et je suis contente de voir que les ateliers sont fréquentés par des personnes de tout âge, dont souvent des enfants avec leurs grands-parents.
Le déroulement est très simple : à l’aide de chants et avec la complicité d’un violoncelliste je leur explique les oeuvres tout en leur donnant des indications sur la musique baroque, l’époque de Louis XV et les ornements en décoration et en musique. A la fin nous mettons en scène un petit morceau, qui pour l’occasion est tiré de Daphnis et Églé.

Quelle est la réponse du public ?

Les gens sont ravis de chanter et cela me fait plaisir. Ce sont de vrais moments de complicité et de partage.

Parallèlement à sa formation en chant lyrique, Cinzia Rota fréquente l'Académie des Beaux-Arts puis se spécialise en communication du patrimoine culturel à l'École polytechnique de Milan. En 2014 elle fonde Classicagenda, afin de promouvoir la musique classique et l'ouvrir à de nouveaux publics. Elle est membre de la Presse Musicale Internationale.

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