Instraviata, une adaptation décalée et fantaisiste de la Traviata de Verdi
Instraviata, une adaptation décalée et fantaisiste de la Traviata de Verdi © Léon Maret

Instraviata : le premier opéra en bande dessinée animée sur Instagram

3 minutes de lecture

Du 1er au 30 mars, le compte Instagram d’ARTE concert diffusera en story Instraviata, “une adaptation décalée et fantaisiste de La Traviata de Verdi”, couplée à un documentaire sur la jeune soprano Elsa Dreisig. Une première.

Pourquoi La Traviata ne se prêterait-elle pas à un feuilleton sur Instagram ? C’est le pari de la production de “Bigger Than Fiction” pour ARTE. Sur son compte, Arte concert proposera dès le 1er mars à 12h, 2min consacrées à cet opéra sous forme de BD animée, puis à 18h, 1min de docu-story sur la carrière et la vie quotidienne d’Elsa Dreisig (Lire notre interview à ce sujet). Cette dernière, qui a intégré en 2017 la troupe du Staatsoper de Berlin, demeure par ailleurs la plus jeune interprète du rôle de Violetta depuis Maria Callas. C’est donc sa voix que l’on retrouve à la fois dans les stories La Traviata et le documentaire.

Instraviata
Instraviata © Léon Maret

L’auteur de bande dessinée Léon Maret a conçu l’animation. A l’origine d’ouvrages parus chez Casterman ou Albin Michel, ce format lui a permis d’explorer de nouveaux horizons artistiques. « Internet étant composé en grande partie de rapport texte-image, c’est un support tout désigné comme terrain d’invention et de renouvellement pour un auteur de bande dessinée qui travaille en permanence ce rapport texte-image » précise le dessinateur.

Ce projet hybride peut déconcerter les premières secondes car nous sommes loin (très loin !) d’une approche pédagogique très policée. Proposant à la fois de la bande dessinée, du dessin animé et du karaoké, l’auteur a choisi des codes graphiques pouvant plaire au jeune public, le cœur de cible d’Instagram rassemblant en majorité les moins de 35 ans. Les couleurs sont pop et les dialogues font mouche. « Je me suis fortement inspiré des dessins animés japonais des années 80, comme Lucile amour et rock’n roll, Juliette je t’aime ou Nikki Larson, dont a été abreuvée toute ma génération enfant poursuit Léon Maret. J’ai traduit La Traviata en un objet de divertissement pop, kitch et transgressif, en en révélant le “queer” présent partout, du travestissement des chanteurs à la description du demi-monde équivoque qu’elle en fait. Une lecture comme un mélodrame gorgé d’un pathos jubilatoire proche du soap-opera. »

Instraviata
Instraviata © Léon Maret

La transposition de cet opéra du XIXème fonctionne parfaitement, aidée par un humour parfois acide et un ton très décalé. Il faut noter qu’à travers La Traviata, Verdi traite de sujets de société qui trouvent encore un écho aujourd’hui : la maladie, l’argent, les mondanités, l’amour…

Une adaptation au prix de quelques libertés prises avec le livret de Francesco Maria Piave d’après le roman d’Alexandre Dumas fils, La Dame aux camélias. Par exemple, la présence plus prégnante du Baron Douphol pour servir l’aspect dramatique, l’égalisation des durées des actes afin d’obtenir un feuilleton efficace sur un mois, l’utilisation des musiques instrumentales de l’opéra dans un ordre aléatoire vis-à-vis de la partition originelle mais en respectant tout de même la succession des parties chantées.

 

Instraviata © Léon Maret 2
Instraviata © Léon Maret

Passer d’un opéra (environ 2h15 pour La Traviata) à des formats ultra courts semble une gageure. Cependant, le rythme imposé par les stories – des tranches de 15 sec maximum – impose une pulsation à laquelle on s’habitue rapidement.
Alors comment l’auteur a-t-il procédé pour réaliser des séquences homogènes ? « J’ai demandé à Claire Alby (ndlr : réalisatrice et productrice de documentaires sur l’opéra) et à un ingénieur du son de découper toute La Traviata en petites séquences de 10 à 15 secondes. À partir de ces découpes, qui font la durée d’une “case” de story, j’ai réécrit le livret, en laissant libre cours à ma fantaisie dans la mesure où elle était contrainte à retomber sur le livret (les parties chantées) le plus souvent possible. »

Cette story de la mi-journée est complétée à 18h d’un docu-story consacré à la soprano franco-danoise Elsa Dreisig. On y découvre sa vie sur scène et côté coulisses, avec les aléas de la vie d’artiste, ses sources d’inspirations, son travail vocal, ou son rapport au machisme… « Cette idée de dévoiler la vie quotidienne d’une chanteuse d’opéra du 21e siècle allait avec notre envie de rapprocher le public (d’Instagram !) d’un art qui est souvent bloqué dans des préjugés ! » confie la chanteuse dans un entretien à paraître demain sur Classicagenda.

L’opéra et Instagram, bientôt une success-story ?…

 


Retrouvez notre interview d’Elsa Dreisig.

Suivez Instraviata sur le compte Instagram d’ARTE concert.

Rédacteur en chef adjoint de Classicagenda, Julien Bordas rédige également depuis 2016 des articles d'actualité, des interviews et des chroniques de concerts. Sa passion pour la musique classique provient notamment de sa rencontre avec l'orgue, un instrument qu'il a étudié en conservatoire et lors de masterclass.

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