Samedi 15 octobre, la Schubertiade de Sceaux entamait sa nouvelle saison avec le duo Marie-Aude Melliès au violon et Itamar Golan au piano. A l’écoute de ce programme, impossible d’imaginer que les deux artistes se produisaient pour la première fois ensemble devant un public.
Itamar Golan, pianiste de renommée internationale, enseigne la musique de chambre au Conservatoire national supérieur de musique et de danse (CNSM) de Paris. C’est ici que le duo avec la jeune Marie-Aude Melliès s’est formé, à l’occasion du confinement. “Lorsque la pandémie a frappé, nous nous sommes retrouvés presque seuls au conservatoire, car la plupart des étudiants et des professeurs se sont enfuis ou sont restés enfermés et isolés chez eux”, explique le musicien. Le duo se retrouvait donc pour travailler le répertoire intensément malgré le contexte. Le fruit de ces heures de collaboration fut présenté ce soir à une assistance conquise par leur prestation.
La violoniste, élève d’Olivier Charlier au CNSM, a fait preuve d’une remarquable maturité dans l’exécution du programme. Aux côtés d’un pianiste de la carrure de Golan, la violoniste a su s’imposer musicalement. Dès la première pièce, la Sonate pour violon et piano de Debussy, Marie-Aude Melliès montre une sonorité riche et maîtrisée, et livre un discours d’une étonnante solidité. L’exécution du Finale nous subjugue par son intensité.
La Sonate n°2 en ré majeur de Prokofiev laisse apparaître le caractère affirmé avec lequel la violoniste magnétise la salle de l’Hôtel de ville de Sceaux, transformée en écrin chambriste.
Quant à la pièce suivante, le violon produira-t-il l’envoûtement promis par la nouvelle d’Ivan Tourgueniev, Le Chant de l’amour triomphant (1881) ? En effet, pour composer son Poème op. 25 pour violon et orchestre, transcrit ensuite pour violon et piano, Ernest Chausson trouva l’inspiration dans ce récit fantastique.
Grâce à leur complicité, les deux musiciens instaurent alors le décor propice au mystère entourant cette pièce. Et le Finale, apaisé, conclura l’oeuvre dans une belle sérénité. La magie opère.
Mythes, de Karol Szymanowski, fait appel aux légendes de la Grèce antique. La fontaine d’Aréthuse laisse s’écouler un piano impétueux, alors que Narcisse montre un violon d’une douce sensibilité.
Pour conclure, le redoutable arrangement de la Carmen fantaisie de Franz Waxman a de quoi impressionner. Les thèmes de l’opéra de Georges Bizet virevoltent avec brio sous l’archet de la violoniste, qui établit une vraie synergie avec son partenaire d’exception. Tout au long du concert, Itamar Golan assure une partie de piano qui va au-delà d’un simple accompagnement. On ressent d’ailleurs toute la complémentarité de ce jeune duo au fil des partitions. Golan porte les mélodies de la violoniste mais sait aussi dialoguer habilement avec elle.
La générosité du duo s’est traduite dans les bis : la Valse sentimentale de Tchaïkovski ou encore l’élégiaque Après un rêve de Fauré ont sublimé une soirée hors du temps.
Le prochain concert de la Schubertiade de Sceaux aura lieu le 19 novembre en compagnie du Duo Geister, piano à quatre mains.