Sandrine Piau. Photo: Sandrine Expilly

Sandrine Piau, le chant de l’enchanteresse

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Le 4 octobre 2023, les Moments Musicaux des Alpes Maritimes ont inauguré leur nouvelle saison de musique ancienne à la Cathédrale Sainte-Réparate de Nice par un concert de la soprano Sandrine Piau, accompagnée par l’ensemble Les Paladins sous la direction de Jérôme Correas.

 Le programme a été conçu autour de la musique du CD que ces artistes ont enregistré pour Alpha en 2021 intitulé Enchantresses. Les enregistrements d’airs de Haendel ne sont pas ce qui manque ces dernières années. Peu nombreux sont les interprètes qui offrent des trésors cachés, préférant se concentrer sur les airs les plus connus et aimés du public ; Piau ne fait pas exception. Son concert se concentre également sur les airs les plus célèbres d’héroïnes telles qu’Alcina, Morgana, ou Cléopâtre. Cependant la prévisibilité du programme fut largement compensée par la qualité du chant de Piau.

Le concert plutôt court, exécuté sans entracte, ne comprenait que quatre airs, entrecoupés de quatre œuvres instrumentales pour permettre à Piau de reposer sa voix. Piau est impressionnante pour sa capacité à soutenir l’intensité d’une ligne vocale. Contrairement aux cantatrices qui donnent l’impression de ne chanter qu’une succession de notes, Piau se concentre sur la transition d’une note à l’autre, attendant le plus longtemps possible pour passer à la prochaine note. Par cette technique, elle donne la priorité à l’espace entre les notes, ce qui lui permet de chanter de manière très expressive, notamment dans les déchirantes phrases descendantes de l’air tragique « Ah, mio cor » d’Alcina.

Sandrine Piau. Photo: Sandrine Expilly

Jérôme Correas a dirigé depuis le clavecin son petit effectif de six instrumentistes à cordes jouant chacun une partie, version réduite de l’ensemble plus ample avec davantage de cordes et de bois utilisé dans l’enregistrement. Cet effectif chambriste avait l’avantage de concentrer l’attention du public sur Piau.

Le public a été récompensé par deux bis extraits de Rinaldo (1711), mettant en valeur la pureté du chant plutôt que les feux d’artifices vocaux. Le premier était peut-être prévisible, l’air le plus célèbre de Haendel, « Lascia ch’io pianga ». Pour le second, Piau a choisi « Il vostro maggio de’ bei verdi anni », composé pour deux cantatrices à l’unisson (les sirènes), mais interprété par Piau seule pour ce concert. Une belle conclusion d’une nouvelle saison prometteuse !

Jacqueline Letzter et Robert Adelson, historienne de la littérature et musicologue, sont les auteurs de nombreux livres, dont Ecrire l'opéra au féminin (Symétrie, 2017), Autographes musicaux du XIXe siècle: L’album niçois du Comte de Cessole (Acadèmia Nissarda, 2020) et Erard: a Passion for the Piano (Oxford University Press, 2021). Ils contribuent à des chroniques de concerts dans le midi de la France.

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